L’égalité est un jeu à somme positive
8 mars 2017
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Discours de Geneviève Letourneux à l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes.

Madame la Maire, chère Nathalie,

Madame la Directrice Régionale des Droits des Femmes et de l’Égalité, chère Anaïg,

Cher.es Collègues,

Mesdames les conseillères départementales,

Mesdames et Messieurs,

Chères et Chers Ami.es,

Merci Nathalie, pour tes mots, pour ton engagement. Si tu symbolises l’avancée de l’égalité, je sais que, comme le disait Colette Cosnier, tu ne te résous pas à être l’arbre qui cache la forêt des oubliées, des invisibles, des silencieuses, des minorées.

C’est un grand plaisir de toutes et tous vous retrouver aujourd’hui 8 mars pour célébrer les droits des femmes et l’égalité entre les femmes et les hommes.

Droits des femmes, de toutes les femmes, égalité entre les femmes et les hommes, ici à Rennes mais aussi partout dans le monde. Une pensée particulière, cette année encore, pour les Syriennes, une inquiétude pour les Russes, les Polonaises, les Américaines et tant d’autres.

Partout où le politique s’enkyste dans une virilité exacerbée et frustre, les droits des femmes sont menacés. L’égalité entre les femmes et les hommes est un marqueur très sensible des dérives réactionnaires et à contrario de la maturité démocratique.

La protection ne tient ni à la force, ni à la puissance virile, qui portent en elles de manière structurelle la domination. La protection nous vient du droit, des droits des femmes, des droits humains.

Notre démarche intégrée, initiée par Jocelyne Bougeard, veut que la politique d’égalité F/H innerve l’ensemble de nos politiques publiques et notre administration.

Cette année, le premier rapport sur l’engagement de la collectivité en matière d’égalité femmes/hommes a été présenté au conseil municipal.

En matière de ressources humaines, la réflexion du comité de suivi du label Égalité professionnelle sur la mixité des métiers nous a amenés à ouvrir le passage entre filières, frontière auparavant infranchissable. Une cellule d’alerte et d’accompagnement a été installée : elle nous permet aujourd’hui de mieux agir contre les situations de harcèlement, de discrimination, susceptibles d’exister dans toute organisation. Des situations qui dégradent et brisent l’énergie, étouffent l’envie et le talent (le doublement des délais de prescription est une avancée pour prendre en compte la complexité des atteintes, mais la première écoute est aussi déterminante). Cette année, les mesures de résorption de la précarité ont continué à bénéficier majoritairement à des femmes. Le dialogue social en cours sur les carrières et rémunérations est aussi porteur d’égalité. Merci Hubert Chardonnet pour ta ténacité et ton engagement.

Permettez-moi de remercier devant vous les artisanes de cet engagement de la collectivité, Merci Elisabeth Malaurie pour votre engagement, Merci Françoise Tyrant, pionnière de la politique des droits des Femmes à Rennes et votre retraite est bien méritée.

Cette année, le fil rouge de la programmation du 8 mars est l’égalité entre les femmes et les hommes dans le sport et la culture et nous invite à jouer l’égalité. Cette thématique nous a permis d’impulser un nouveau cycle dans la prise en compte de l’égalité F/H, dans le sport et la culture. Je veux d’ailleurs saluer l’implication de mes collègues Yvon Léziart et Benoît Careil.

Observer, questionner le sport et la culture avec les lunettes de l’égalité nous amène à considérer que ces espaces de plaisir et de liberté, de réalisation de soi soi-même, de dépassement et d’émancipation sont aussi traversés par des rapports de domination, par un contrôle du corps des femmes.

Faire du sport, avoir des activités culturelles et artistiques demande du temps, du temps pour soi. Le déséquilibre entre le temps domestique des femmes et des hommes, 1h30 par jour en moyenne, explique le déséquilibre mesuré dans la pratique sportive qui, comme pour la présence dans l’espace public, s’accentue au moment de l’adolescence: proportion des licences sportives délivrées 37% pour les femmes, 63% pour les hommes.

La question du corps des femmes, de sa maîtrise, de sa prétendue fragilité est aussi un vecteur des inégalités F/H ds le sport et la culture. C’est la performance des sportives qui plutôt que d’être applaudie autorise des tests de féminité, c’est l’éviction des actrices dès les prémices du vieillissement, alors que les acteurs mûrissent gagnent en profondeur les actrices fanent et perdent tout intérêt.

Je veux remercier très sincèrement l’ensemble des associations, collectifs, institutions qui justement « jouent le jeu ». Cette programmation c’est la vôtre. Elle est riche de la pluralité, de la singularité des engagements, de l’ingéniosité de vos propositions. Nous « jouons collectif » et la qualité de la programmation est le reflet de cette belle dynamique. BRAVO&MERCI

Au-delà de la programmation, je veux vous dire tout le plaisir que j’éprouve à travailler avec cet écosystème féministe qui irrigue notre ville. Cet écosystème ancré dans l’histoire de Rennes est une partie notre matrimoine et contribue au quotidien à reconnaitre, à valoriser, et à promouvoir la part des femmes dans la construction du commun.

Le matrimoine est la reconnaissance de ce qui nous vient des femmes. Le comité consultatif égalité femmes / hommes a d’ailleurs dans le cadre de Rennes 2030 produit une contribution sur le matrimoine.

La haie d’honneur pour les droits des femmes et l’égalité a été un moment fort de ce jeu collectif, jeu collectif qui nous permet de questionner, de rencontrer, d’avancer avec les Rennaises et les Rennais.

Je souhaite remercier le CIDFF35 et particulièrement sa directrice, chère Régine Lépinay qui a coordonné et imaginé cette présence collective, avec la complicité active de Christine Barbedet de Comme à l’envi.

Et je n’oublie pas la proposition du Planning familial de regarder la ville à travers le prisme des droits des femmes et de l’égalité avec son Rallye photographique, ni le soutien logistique convivialité du CGLBT. Merci à vous toutes et à vous tous qui avec ces slogans féministes souvent plein d’humour, avez permis la rencontre avec les passantes et les passants.

Bravo & Merci pour votre intelligence collective.

Chausser les lunettes de l’égalité ce n’est pas voir la vie en rose, c’est au contraire voir derrière la banalisation de l’inégalité, voir la mécanique insidieuse de la minoration, de la dévalorisation, des freins, c’est débusquer les assignations, les enfermements dans des rôles étriqués, c’est désamorcer les entraves à la liberté et à l’émancipation, c’est mesurer le chemin qu’il reste à parcourir pour atteindre l’égalité réelle.

Ces sont les assignations de genre, les étiquetages, les interdits, le sexisme ordinaire qui structurent les imaginaires, dévalorisent et organisent l’inégalité systémique. Ainsi les inégalités s’entretiennent et se reproduisent, entravent l’accès des femmes aux responsabilités.

Cette inégalité systémique n’est pas forcément consciente et volontaire, et elle est mesurée à postériori. Ainsi, les femmes ne représentent que 20% des bureaux des fédérations sportives olympiques et 17% des cadres techniques. Bien que les étudiantes en art soient plus nombreuses que les étudiants, seulement 20% des créations présentées au public dans le spectacle vivant en Bretagne sont signées par des femmes.

Pour remédier à cet état de fait, être pour l’égalité ne suffit pas, il faut agir pour contrecarrer les ressorts de l’inégalité systémique.

C’est une valse à trois temps : 1-il faut prendre le temps de mesurer (voir &savoir), 2-ne pas se contenter du « c’est ouvert à tous donc à toutes », il faut étayer la légitimité, la crédibilité des femmes de manière volontariste, 3-il faut transformer les représentations, déboulonner les stéréotypes, cultiver l’égalité, valoriser les modèles de réussite.

L’égalité est un jeu à somme positive, il n’y a pas des perdants et des gagnants. L’égalité ouvre des horizons, apporte de l’agilité, libère les talents. Vous en faites chacune et chacun, dans vos engagements, dans vos parcours, l’expérience et la démonstration. Vous en êtes au quotidien, les bâtisseurs, bâtisseuses et les garants.

Le droit à disposer de son corps, à avoir du temps pour soi, à s’exprimer, à s’épanouir est la condition d’une société plus juste, plus démocratique, plus équilibrée, plus riche de tous ses talents, plus solidaire, plus créative.

Geneviève Letourneux
Conseillère Municipale déléguée aux droits des femmes et à l’égalité