Conseil municipal du 21 janvier : Hubert Chardonnet intervient sur le grand débat national
22 janvier 2019
0

Mes chers collègues,

Comme de nombreuses villes de notre pays, Rennes a été le théâtre samedi dernier de manifestations qui ont été émaillées de dégradations inadmissibles de commerces et de mobilier urbain. Les rassemblements observés ces dernières semaines dans notre ville s’étaient jusqu’à présent déroulés sans débordements majeurs – à l’exception bien sûr de l’intrusion dans l’Hôtel de Ville le 6 janvier.

Tout comme la Maire l’a fait immédiatement samedi, nous tenons à condamner avec la plus grande fermeté ces faits de violence intolérables qui ne peuvent que desservir les revendications de leurs auteurs. Nous apportons notre soutien aux victimes de ces débordements, et en particulier aux riverains et aux commerçants. Nous saluons l’engagement et la forte mobilisation des forces de l’ordre face aux casseurs. Nous adressons nos vœux de rétablissement aux blessés qui sont à déplorer.

Ces tensions dans notre ville, mais aussi à Toulouse, à Angers, à Bordeaux, à Nantes, à Marseille – et je pourrais continuer cette liste – témoignent d’une mobilisation qui ne faiblit pas malgré le lancement officiel du débat national, le 15 janvier dernier, un peu plus d’un mois après l’annonce initiale du Président de la République.

Nous souhaitons sincèrement que ce temps de débat soit un temps utile à notre pays pour répondre aux revendications sociales concrètes et légitimes qui se nourrissent d’une demande profonde de considération et de respect. Et pour permettre également aux aspirations démocratiques qui résultent d’une crise politique que nous savons déjà ancienne de trouver des débouchés.

À Rennes, à l’initiative de la Maire qui avait d’ailleurs appelé à l’organisation d’un débat national dès le mois de novembre, un cahier de contributions citoyennes a été ouvert à l’Hôtel de Ville à la mi-décembre. La semaine dernière, d’autres cahiers ont été mis à la disposition des Rennaises et des Rennais dans les Mairies et les Directions de quartier.

De même l’organisation des réunions d’initiative locale sera possible dans trois salles municipales, qui seront prioritairement prêtées à cette occasion : la salle Guy Ropartz, l’auditorium de la Maison des associations et la Salle polyvalente de la mairie de quartier Bréquigny.

Nous invitons le tissu associatif, les forces vives et les citoyens à se saisir, s’ils le souhaitent, de ces facilités pour s’exprimer, pour déposer leurs idées, pour proposer leurs solutions.

Nous regrettons cependant – cette intervention est l’occasion de l’exprimer – nous regrettons une forme de contradiction, qui devra d’ailleurs rapidement être levée entre la volonté affichée du Gouvernement et du Président de la République d’ouvrir un dialogue libre tout en ayant, « en même temps », limité le champ des questions et en ayant affirmé implicitement que le cap politique et fiscal ne changera pas.

Chacun doit être assuré que les jeux ne sont pas faits à l’avance et que toutes les questions essentielles sont ouvertes et sur la table, y compris celle du rétablissement de l’impôt de solidarité sur la fortune ; y compris aussi celles du pouvoir d’achat, de la lutte contre la pauvreté, la précarité ou le mal-logement. Des thèmes qui étaient malheureusement absents de la lettre aux Français du Président de la République.

Nous regrettons en revanche que les sujets complexes de l’immigration, ou de la laïcité, contrairement à ce qui avait été annoncé dans un premier temps, figurent finalement dans les thèmes du débat. Chacun sait combien pourtant ces questions peuvent être sujettes à des instrumentalisations ou à des exploitations politiciennes dangereuses – elles l’ont été dans un passé récent.

Pour réussir le débat national doit être non seulement ouvert, mais aussi transparent dans sa méthode et dans sa finalité. Des garants ont été nommés mais feront-ils vraiment contrepoids face aux ministres coordinateurs ?

Quid surtout des conclusions du débat ? Elles ne pourront pas, elles ne devront pas être tirées par le Président seul. Une conférence sociale finale avec les partenaires sociaux semble indispensable pour affiner, préciser, négocier les réponses finales et ainsi remettre les corps intermédiaires, là où ils doivent toujours être, c’est-à-dire au centre du jeu démocratique.

Le débat ne peut pas se limiter à un dialogue direct, ou plutôt d’ailleurs à un monologue direct, du Président de la République avec les citoyens ou les maires. C’est cette pratique verticale, isolée – j’allais dire jupitérienne – du pouvoir qui a fait la démonstration, avec cette crise, de l’impasse à laquelle elle menait.

Nous avons la conviction, en tous les cas, que l’idée de justice est au cœur des réponses qui sont attendues aujourd’hui et qu’elle doit être déclinée en justice sociale, justice fiscale, justice environnementale, justice démocratique enfin pour que tous les citoyens soient placés à égale distance de la prise de décision politique.

C’est le sens des politiques publiques que nous développons à Rennes, de longue date. C’est le sens du projet municipal que nous portons depuis bientôt cinq ans maintenant avec tous les groupes de la majorité et nous aurons l’occasion, durant tout ce conseil municipal, de l’illustrer par des avancées concrètes.

Je vous remercie.