Geneviève Letourneux, conseillère municipale déléguée aux droits des femmes et à la lutte contre les discriminations
4 février 2021
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Militants du Parti socialiste unifié (PSU), les parents de Geneviève Letourneux se sont rencontrés lors d’une occupation d’usine à Nantes en mai 68, un an avant sa naissance : « même si j’ai fait en sorte que mon engagement ne soit pas un pur atavisme, ça façonne. J’ai hérité de leur sensibilité, de leurs valeurs. » En 1983, un événement marque profondément l’adolescente de 14 ans, il s’agit de la marche pour l’égalité et contre le racisme. Durant ces années qui voient fleurir moult initiatives contre les discriminations – la création de SOS racisme ayant marqué toute une génération – la jeune femme s’intéresse à toutes ces questions et notamment au passé esclavagiste de sa ville natale.

Une décennie plus tard, face à la guerre qui terrasse les pays de l’ex-Yougoslavie, elle s’engage contre la purification ethnique menée par le pouvoir nationaliste serbe qui se déroule dans l’impunité générale. Dans le cadre de son engagement dans les clubs Forum réunissant les jeunes rocardiens, elle participe au comité Vukovar-Sarajevo autour de la revue Esprit. Elle sillonne également les routes à bord d’une caravane de la paix et devient correspondante du festival d’hiver de Sarajevo. C’est à cette époque qu’elle découvre le viol comme arme de guerre massive et les égarements de la pureté identitaire. Face à ces atrocités, elle milite pour que Sarajevo devienne capitale culturelle de l’Europe : « la culture est un besoin essentiel, grâce à elle, les personnes peuvent retrouver leur dignité et ne pas être réduites à l’état de bêtes traquées. »

À cette époque, elle entame des études d’économie, de sociologie et de science politique à Nantes puis en région parisienne. Pour « ne pas avoir à rendre de compte sur sa vie de femme », elle passe le CAPES et l’agrégation et devient professeure de sciences économiques et sociales (SES) au lycée. Engagée au Parti socialiste depuis 1988, elle milite au sein de la section parisienne puis à Orléans où elle vit durant quelques années, avant de s’installer définitivement à Rennes, en 2005. Trois ans plus tard, lors des élections municipales, elle fait acte de candidature pour figurer sur la liste socialiste de Daniel Delaveau. Ce dernier accepte, ce qu’elle analyse comme un « signe d’ouverture » de la capitale bretonne à l’égard des nouveaux arrivants.

Entre 2008 et 2014, elle est donc en charge de l’éducation artistique et de la médiation culturelle, en plus d’être élue des quartiers Jeanne d’Arc-Longs-Champs-Beaulieu. De ce mandat, si intense qu’elle le compare à une « machine à laver », elle en retient la concertation avec les habitants sur le tracé de la ligne b du métro dans le Nord-Est de Rennes, la mise en place de la carte Sortir ou encore des classes-orchestres pour que la politique culturelle de la Ville touche tous les milieux sociaux.

Ardente défenseuse de la mixité sociale et de l’école républicaine, elle se dit « très gênée par toutes les stratégies d’évitement » de ceux qui ne mettent pas leurs enfants à l’école publique, considérant que « l’on n’apprend pas la liberté, l’égalité, la fraternité et la sororité sous cloche. » Elle défend également l’utilité de la politique de la ville, dont elle est en charge à la métropole entre 2014 et 2020, en ce que cela permet d’« apporter des réponses plurielles à une population diversifiée. »

Conseillère municipale aux droits des femmes et à la lutte contre les discriminations depuis 2014, elle déplore l’absence de politique nationale en la matière qui ne permet pas de s’attaquer à la dimension systémique des discriminations. Elle œuvre alors, à l’échelle locale, pour mieux armer le territoire face aux discriminations. C’est notamment l’objet du plan de lutte métropolitain contre les discriminations et de la grande enquête de ressenti discriminatoire à laquelle 2 500 personnes ont répondu en 2019, permettant de dresser un état des lieux des ruptures d’égalité sur le territoire.

En matière d’égalité femmes-hommes, Rennes fait office de modèle puisqu’elle est arrivée n°1 du palmarès des villes françaises les plus engagées dans ce domaine, en 2015. Elle a d’ailleurs été la première collectivité à obtenir le label de l’égalité professionnelle et compte bien rester pionnière sur ces sujets. C’est tout l’enjeu de notre élue mais quand on s’inspire de Jaurès, Blum, Mendès France, Rocard, Françoise Héritier, Frantz Fanon et Anne Sylvestre, on ne peut qu’y parvenir, non ?


Quel est son rôle ?

Parmi les grands chantiers de ce nouveau mandat, la mise en œuvre du budget genré permettra à la Ville de s’assurer que les projets qu’elle finance bénéficient autant aux femmes qu’aux hommes. De manière générale, l’objectif est d’étendre la culture de l’égalité à l’ensemble des politiques publiques : en matière d’éducation, par la création de cours de récréation non-genrées, ou encore en matière d’espace public et d’aménagement pour que les équipements (toilettes publiques, vestiaires, etc.) répondent aux besoins des femmes.

Accompagner les initiatives locales en faveur de l’égalité, coordonner les acteurs-clés de la lutte contre les discriminations (police, justice, éducation, etc.), pallier aux carences de l’État en matière d’hébergement – grâce notamment à l’ouverture prochaine d’un lieu d’accueil 24h/24, 7j/7 pour les femmes et leurs enfants victimes de violence – ou encore former les agents de la collectivité et sensibiliser la population aux discriminations … Les axes de travail sont nombreux mais l’objectif reste le même : mieux repérer les atteintes à l’égalité et mieux accompagner les victimes, sans les réduire à ce qu’elles ont subi.