Jocelyne Bougeard : dénonciation des attaques turques dans la région d’Afrin

Jocelyne Bougeard

Intervention de Jocelyne Bougeard lors du conseil municipal du 29 janvier 2018.


Depuis une dizaine de jours, plusieurs villes de la région d’Afrin, au nord de la Syrie, sont bombardées par les forces armées turques, faisant des centaines de victimes civiles.

Les forces armées turques mènent l’assaut contre la zone gérée par les Kurdes, l’une des rares jusqu’ici, à avoir échappé à la destruction et servi de refuge à des milliers de déplacés syriens. Les forces armées ciblent des sites militaires de l’YPG, “Unités de protection du peuple”, branche armée du Parti de l’union démocratique (PYD) syrien. L’YPG, déclarée organisation terroriste par le gouvernement turc, est aussi connu pour ses faits d’armes contre l’État islamique, et constitue une composante essentielle du front commun contre le terrorisme.

Cette violation des règles élémentaires du droit international nous alarme d’autant plus que la situation humanitaire dans la région, du fait de la guerre qui y sévit depuis de nombreuses années, est tragique. La France a pris l’initiative de la tenue d’une réunion d’urgence du Conseil de Sécurité des Nations unies et appelé la Turquie à la retenue.

Cette opération militaire nous interpelle également au nom des liens forts que notre ville a noué avec Diyarbakir depuis plus de trente ans.

A l’automne 2016, 93 maires des 102 mairies de la région ont été emprisonnés. 72 étaient encore retenus fin 2017. À Diyarbakir, les co-maires de la municipalité métropolitaine, Madame Gültan Kişanak – que nous avons accueillie un peu avant son arrestation – et Monsieur Firat Anli, ont été arrêtés le 25 octobre 2016. Toujours détenue, Mme Kişanak encourt 230 ans de prison pour « direction d’une organisation terroriste », le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), et pour 41 actes supposés de propagande en faveur du PKK. M. Anli a été relâché en juillet 2017. Il risquerait la prison à vie pour avoir, selon le Parquet, soutenu matériellement la création d’un cimetière de combattants du PKK.

La ville de Diyarbakir est depuis administrée sous tutelle de l’État : 2 000 des 5 600 agents municipaux auraient perdu leur emploi ou reçu une nouvelle affectation. Aucun conseil municipal ne s’est tenu depuis plus d’un an.

La Ville de Rennes tente, tant bien que mal, de poursuivre ses contacts avec la municipalité kurde, mais nous manquons de relais.

Madame la Maire a engagé de multiples interpellations, diffusé un communiqué de presse dès le 26 octobre 2016, et fait adopter par le Conseil municipal un vœu le 5 décembre 2016. Madame la Maire a ensuite adressé un courrier d’alerte à Monsieur Ayrault, alors Ministre des Affaires étrangères, puis à Monsieur Le Drian, l’actuel ministre. Elle a aussi transmis un courrier à Madame Kisanak, co-Maire de Diyarbakir, sans réponse à ce jour, ainsi qu’un courrier d’interpellation à l’attention de l’ambassadeur de Turquie en France et de l’ambassadeur de Turquie auprès de l’UE en juin 2017 à l’occasion de l’ouverture du procès de Mme Kisanak.

Samedi après-midi, à l’appel de l’association Amara, la maison du peuple kurde de Rennes, près d’un millier de personnes ont manifesté dans les rues de Rennes pour dénoncer les frappes turques dans l’enclave kurde d’Afrin. L’opération militaire connue sous le nom de “Rameau d’olivier” aurait déjà provoqué plusieurs centaines de morts.

La Ville de Rennes poursuivra son engagement en faveur du respect des droits humains, des principes démocratiques qui protègent les représentants élus des pouvoirs locaux ainsi que l’appel d’une solution politique durable, en interpellant les autorités nationales et européennes, ainsi que les réseaux de collectivités, en poursuivant également les échanges et soutiens aux associations rennaises en lien avec la Syrie.

Je vous remercie.