Conseil municipal du 10 septembre : intervention de rentrée, par Hubert Chardonnet
11 septembre 2018
0

Madame la maire,
Chers collègues,

Comment ne pas voir, en cette rentrée, une invitation à agir et à exercer nos responsabilités au nom des convictions profondes qui nous animent ?

Cet été a d’abord été marqué par une vague de chaleur record, qui a entrainé des incendies meurtriers en Europe et une accélération sans précédent de la fonte des glaces en Antarctique. Depuis de nombreuses années, les scientifiques alertaient sur les conséquences désastreuses et irréversibles que le changement climatique provoquerait, si jamais il n’était pas endigué à temps.

D’une certaine manière, nous avons, pour la première fois, chacun dans nos vies quotidiennes, touché du doigt ce que nos villes pourraient devenir si elles ne s’adaptaient pas à la hausse des températures et si elles ne prenaient pas leurs responsabilités pour réduire les émissions de gaz à effet de serre.

C’est dans ce contexte qu’est intervenue la démission fracassante, et je dirais aussi émouvante, de Nicolas Hulot. Son réquisitoire contre la politique gouvernementale et les arbitrages rendus au plus haut niveau de l’Etat étaient sans ambiguïté.

« Avons-nous commencé à réduire nos émissions de gaz à effet de serre ? Non. Avons-nous commencé à réduire l’utilisation des pesticides ? Non. A enrayer l’érosion de la biodiversité ? Non »

Mais, au-delà et sans esprit polémique, ce que nous devons retenir de sa décision courageuse, c’est l’électrochoc, le réveil des consciences qu’il a voulu provoquer. Nos vies quotidiennes, individuelles, sont traversées par des ambivalences, si ce n’est des contradictions, entre certains comportements éco-responsables que nous adoptons ou voulons progressivement adopter et d’autres habitudes qui ne le sont toujours pas.

L’heure doit être au combat environnemental, combat des citoyens eux-mêmes mais aussi combat bien sûr de tous les pouvoirs publics. C’était le message de la Marche pour le climat à laquelle nous avons pris part samedi. Et c’est le mot d’ordre de notre ville qui a fait de la transition énergétique la boussole et le fil rouge de ses politiques, de ses chantiers, de ses projets.

La Maire de Rennes l’a affirmé avec force : Rennes a vocation à devenir une ville leader contre le changement climatique. Parce que l’Histoire ne nous cherchera pas d’excuses. Et parce que le sursaut doit se produire maintenant.

Je ne vais pas me lancer dans un rappel de toutes les initiatives que notre majorité a prises – je regarde les collègues d’autres groupes – dans tous les champs : préservation de l’eau, cantine bio et locale, schéma d’achats responsables…

Nous avons changé de paradigme. Nous l’avons fait de façon structurelle en particulier avec le nouveau PLU. À l’horizon 2025, nous aurons augmenté de 15% les surfaces d’espaces verts publics avec le coefficient de biotope. Nous aurons planté 3000 arbres supplémentaires. Nous aurons posé de l’enrobé végétal dans nos écoles. Nous aurons aménagé un grand parc public de 30 hectares au cœur de la ville, les Prairies Saint-Martin. Les Prairies, dont la première phase de travaux s’achèvent – seront le point de départ d’une diagonale verte à travers la ville, jusqu’aux étangs d’Apigné, en passant par la Prévalaye, des sites que nous aménagerons ou sur lesquels nous soutenons des projets durables, d’agriculture urbaine.

Nous avons lancé, la semaine dernière, une nouvelle étape dans la transformation écologique de notre ville avec la concertation « cœur de Rennes 2030 ». Nous donnons la parole aux Rennaises et aux Rennais pour que, dans l’esprit des orientations qu’ils ont retenues pour le projet urbain, ils nous disent le cœur de ville qu’ils souhaitent pour la prochaine décennie.

Comment réaménager nos rues, nos places, nos quais pour une plus grande présence du végétal, de la biodiversité, qui seront ensuite autant de remparts contre les îlots de chaleur ? Comment faciliter les modes de transports doux et les déplacements des personnes à mobilité réduite ? Comment mieux valoriser notre patrimoine, conforter nos commerces, favoriser le brassage dans ce quartier qui doit être celui de tous les autres ?

Notre ville a toujours placé la cohésion sociale, la solidarité et donc l’attention aux plus fragiles, aux plus modestes, au cœur de ses préoccupations, de ses valeurs, de son identité de ville humaniste.

C’est pourquoi, toujours cet été, nous avons également été profondément troublés par le sort réservé aux migrants sauvés en mer par l’Aquarius. 141 personnes, dont plus de la moitié d’enfants, venant de Somalie et d’Érythrée et donc de ce fait réfugiés de guerre. 141 personnes laissées plusieurs jours sans port d’accueil, au cœur d’une controverse, puis d’un troc entre Gouvernements européens refusant de prendre leur part. En juin déjà, la France avait refusé d’ouvrir ses ports à l’Aquarius.

Il n’est pas tolérable que la rhétorique des partis de la fermeture contamine ainsi le débat public. Il faut organiser en Europe bien sûr, mais aussi dans notre pays, une répartition équitable et contraignante de l’effort d’accueil, d’intégration et d’accompagnement des réfugiés. Il y a d’autres Aquarius et nous ne pouvons plus détourner simplement le regard.

Nathalie Appéré avait appelé, l’année dernière, avec cinq autres maires de grandes villes, de toutes obédiences politiques, à la mise en œuvre d’un plan d’accueil des migrants, qui réponde aux droits fondamentaux ; plan coordonné avec l’Etat et les associations, qui font un travail formidable.

Cet appel est resté jusqu’à présent sans réponse. Ce qui n’a pas empêché Rennes, de prendre toute sa part et même au-delà.

La Maire a pris l’engagement qu’aucun enfant ne dorme dans les rues de notre ville. Toutes les nuits, alors qu’il ne s’agit pas de son champ de compétences, la Ville héberge, à titre humanitaire, plus de 250 personnes. Elle prend en charge des nuitées hôtelières ou met à disposition des logements lui appartenant afin de mettre à l’abri des familles en situation de grande vulnérabilité.

Dans ce contexte, nous n’avons pu que regretter la décision unilatérale de l’État de durcir les conditions de prise en charge des familles de migrants par le 115. Nous avons, sans hésiter, pallié ce désengagement.

Mais nous le savons, seules des réponses concertées entre l’État, qui doit rester le pilote de l’hébergement d’urgence et garantir des moyens à la hauteur de ses obligations, les collectivités et les associations peuvent assurer des conditions d’accueil dignes et pérennes.

Le Président de la République s’était engagé à ce qu’il n’y ait plus, « d’ici la fin de l’année [2017], des femmes et des hommes dans les rues. » Nous sommes prêts à échanger avec l’Etat sur les conditions de mise en œuvre à Rennes de cet engagement.

Voilà, Madame la Maire, chers collègues, sur ces deux sujets fondamentaux et qui ne cesseront de l’être davantage encore dans les prochaines années, le dérèglement climatique et l’accueil des réfugiés, la réponse convaincue, déterminée et constructive que porte notre ville, sans relâche et sans complexe.